La rixe de la rue Harvey
Le Petit Parisien — 23 mai 1883
On se souvient qu’il y près d'un an, de nombreuses rixes ont eu lieu dans le treizième arrondissement entre les ouvriers français et italiens travaillant dans une importante raffinerie du boulevard de la Gare. Plusieurs arrestations furent faites, et pendant quinze jours au moins un service d'ordre fut établi dans le quartier.
Depuis cette époque, tout paraissait calme, de temps en temps on apprenait que dans un café ou dans un bal une violente querelle s'était produite entre des ouvriers français et italiens, mais jamais le couteau n'avait été tiré. On s'était borné à un échange de coups de poing. On ne cessait de répéter dans l'arrondissement qu'un jour ou l'autre, les Italiens se vengeraient, cela devait malheureusement se produire.
La nuit dernière, vers onze heures et demie, trois ouvriers français et un Italien se trouvaient réunis dans une maison publique située au n°3 de la rue Harvey. Ils y dépensèrent beaucoup d'argent, mais lorsqu'on dut régler la dépense, il y eut des discussions de part et d’autre. Cependant ils partirent ensemble en voiture.
Arrivés en face du n°11 de la même rue, l'italien chercha querelle à ses compagnons. L'un descendit Louis Rataud, âgé de vingt et un an, descendit de voiture pour lui demander des explications. Il fut aussitôt frappé d'un coup de couteau au cœur. Le malheureux tomba perdant son sang et mourut cinq minutes agrès sans avoir pu reprendre connaissance.
M. Robin, un camarade de Rataud, se précipita immédiatement au secours de son ami, mais au moment où il allait se jeter sur le meurtrier, celui-ci lui portait un coup de couteau au côté droit, et prenait ensuite la fuite.
M. Grillère, commissaire de police, 60, rue Jeanne-d'Arc fut prévenu. Il commença son enquête, fit transporter le mort à la Morgue, et le blessé à l'hôpital de la Pitié. M. Macé, chef de la sûreté, chargé de découvrir l'assassin, de concert avec M. Athalin, juge d'instruction, a fait faire d'importantes recherches dans la cité Jeanne-d'Arc qui est voisine du lieu où le crime a été commis.
Le meurtrier n'a pas encore été arrêté. On ignore son nom mais on possède son signalaient qui a été donné par M. Robin.