Un joli monde
La France — 5 novembre 1893
Au n° 1 de la rue Tiers, à côté de la place d’Italie, existait un bouge des plus mal famés, connu sous le nom de la « Treille », et tenu par un individu du nom d'Hallaens, où se réunissaient tous les souteneurs et toutes les filles du quartier.

C’est dans ce repaire que M. Siadoux, commissaire de police, captura en 1887 la fameuse bande des étrangleurs, et depuis la bande de Sale-Nez et une foule de malfaiteurs dangereux. C’est là encore qu’il y a environ trois semaines, ainsi que nous l'avons raconté, un des garçons, Lecerf, était tué d’un coup de tranchet par l’un des habitués.
Ces jours derniers, un huissier se présentait pour procéder à l’expulsion du tenancier Hallaens, qui louait l’hôtel tout meublé à M. Lafage, marchand de meubles à Grenelle et le sous-louait à toute une bande de filous et de gens sans aveu, ses complices.
Hallaens ne s’était pas contenté de ne jamais payer son propriétaire, il avait déménagé tout le mobilier.
L’huissier et ses employés furent reçus à coups de bouteilles et de gourdins et ils durent aller quérir main-forte auprès du commissaire de police.
Quand M. Siadoux arriva à la Treille, Hallaens et ses complices avaient disparu et l’hôtel était vide.
Ce n’est qu’hier soir, après d’actives recherches, qu’Hallaens a pu être arrêté dans un débit de vins qu’il venait d’ouvrir à la porte Ornano. On a pu mettre aussi la main sur plusieurs de ses acolytes, Delamarre, dit Béquillard, chanteur ambulant ; Lemaître, dit Charlot ; Eugène Simon, dit Zouzou ; les filles Jeanne Bourgeois, dite Carmen, et Maria Herz, dite Cornélia.
Tout ce joli monde a été envoyé au Dépôt.

Source originale : Archives de Paris AD075PH_UPF1281