L’escroc de la rue de Gentilly
Le Petit-Journal — 18 février 1889
M. Perruche, commissaire de police du quartier de la Salpêtrière, vient d'arrêter un aventurier qui, s'affublant tour à tour du nom de nos peintres les plus en renom, commettait impudemment depuis fort longtemps des escroqueries aussi audacieuses, que variées.
Cet individu, qui à force de changer de nom n'a pu indiquer le sien propre, était du reste peintre de son état. Dans la rue de Gentilly avait loué un atelier des plus spacieux dont les murs étaient littéralement tapissés de tableaux, mais quels tableaux ! C'est-là qu'il donnait rendez-vous à des bijoutiers, faïenciers, marchands de vins en gros surtout, auxquels il faisait des commandes fabuleuses ; car à tous il inspirait confiance par ses belles paroles et son bagout. Naturellement les marchandises, à peine livrées, disparaissaient.
Après diverses plaintes portées, ce chevalier d'industrie était donc arrêté avant-hier matin. Dans l'après-midi, M. Perruche se rendit rue de Gentilly pour perquisitionner dans le fameux atelier. L'escroc suivait, sous bonne garde, le commissaire. Tout à coup, au cours de la perquisition, notre homme fit-jouer une porte dissimulée sous une tenture, se trouva dans un jardin, escalada un mur et prit la, clef des champs.
Gardiens.de la paix, inspecteurs et commissaire se lancèrent à sa poursuite et le rattrapèrent seulement après une heure d'une course folle.