Les fauves de la Goulue
Le Temps — 11 janvier 1904
Les époux Droxeler, plus connus, le mari, sous le nom du dompteur José, et la femme sous celui de La Goulue, promènent, comme on le sait, dans les foires parisiennes une ménagerie qui fait de temps en temps parler d’elle. Cette ménagerie est actuellement installée avenue d’Italie, en face de la gare de la Maison-Blanche.

Elle a été, hier soir, le théâtre d’une scène tragi que, qui n’aura, il faut l’espérer, aucune conséquence grave. Vers onze heures, le dompteur José exhibait, devant une salle pleine, un jeune puma du Mexique, et sous la menace d’un fouet, le faisait se dresser sur ses pattes de derrière.
Tout à coup, le fauve se précipita sur son dompteur et lui enfonça ses griffes dans la tête.
La Goulue vint au secours de son mari et fut grièvement blessée à la main droite. Cependant, le puma s’acharnait sur M. Droxeler et l’atteignait, de coups de pattes rapides, en plusieurs parties du corps.

Un employé de la ménagerie, Louis Soque, essaya de l’éloigner de sa victime en le frappant de coups de couteau ; mais le fauve s’excitait toujours davantage, et il fallut l’abattre d’un coup de revolver.
Le dompteur José a reçu les soins d’un médecin, et n’a pas voulu être envoyé à l’hôpital. On pense qu’il devra garder le lit pendant trois semaines.
Quant à La Goulue, elle supporte sa blessure avec un courage tout particulier. Ce matin, au moment où nous nous sommes présenté dans la roulotte at tenante à la ménagerie, un peintre était occupé à calligraphier, sur une bande de calicot, l’annonce suivante :
Mme La Goulue prend le travail avec la panthère qui a dévoré, la tête et mangé la main du dompteur José.
— Il faut bien vivre, nous dit la dompteuse, et, quand on n’est pas millionnaire, on fait comme on peut.
Sur la Goulue
Faits-divers
- Les mésaventures de la Goulue (1901)
- Un drame dans une ménagerie (1904)
- Les fauves de la Goulue (1904)