Une descente mouvementée
Le Gaulois — 6 juin 1901
Le ballon le Rêve, d'une contenance de mille mètres cubes, monté par l’un de nos aéronautes les plus connus le comte Henry de La Vaulx, ayant à son bord M. et Mme Dugué de La Fauconnerie, partait mardi, à cinq heures du soir de l'usine à gaz de la Plaine-Saint-Denis pour exécuter une ascension libre.
Le Rêve s’éleva bientôt à une altitude de quinze cents mètres et plana au-dessus du bois de Vincennes mais le vent le ramena sur Paris dans la direction de l’Opéra. Comme il ne voulait pour rien au monde tomber sur la ville au moment où les becs de gaz sont allumés, le comte de La Vaulx a ouvert la soupape dès qu’il aperçut un terrain découvert.

Le ballon est descendu, sans secousses, dans la rue du Moulin-des-Prés, à l'angle de la rue de Tolbiac, dans les jardins de Mme veuve Dubois.
Une fois atterri, la population du quartier afflua rue du Moulin-des-Prés et M. Maillot, officier de paix, dut organiser un véritable service d’ordre.
En procédant au dégonflement avec l'aide du gardien de la paix Poutrier et de MM. Henri et Jean Duménil, marchands des quatre-saisons, un charretier, André Payeur, demeurant 34, rue de la Butte-aux-Cailles, fut surpris par les émanations de gaz et tomba à demi asphyxié.
Cet accident, qui n'a eu heureusement aucune suite funeste, souleva, contre les aéronautes les fureurs de la foule qui ne parlait de rien moins que de brûler le ballon et de lyncher ceux qui le montaient. La police dut intervenir.
Le Rêve fut remisé chez M. Jousset, entrepreneur de travaux publics, rue du Moulin-des-Prés, et le comte de La Vaulx et ses compagnons de route purent non sans peine ni sans danger monter dans une voiture, qui s'éloigna, au pas, escortée de chaque côté par des gardiens de la paix.

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