A L'HÔTEL DE VILLE
L'assainissement de la cité Jeanne-d'Arc
Le Temps ― 17 janvier 1934
Au cours de sa dernière session, le Conseil municipal a été, sur le rapport de MM. Roéland, Louis Sellier et Robert Mounier, unanime à approuver le projet présenté par le préfet de la Seine relatif à l'assainissement de la cité Jeanne-d'Arc, dans le 13" arrondissement.
La. cité Jeanne-d'Arc, qui a été, jusqu'en 1924, propriété de l'Assistance publique, appartient aujourd'hui à une société privée. Néanmoins, l'administration se préoccupait, depuis longtemps déjà, de l'assainissement de cette cité qui se trouve comprise dans l'îlot insalubre n° 4.
Pour donner une idée de ce qu'est la cité Jeanne-d'Arc, il convient de citer ce passage du rapport de M. Roéîand :
L'état de malpropreté et d'insalubrité de la cité Jeanne-d'Arc provient du fait des habitants, auxquels les usages civilisés paraissent absolument étrangers et qui semblent notamment se faire un jeu d'obstruer les canalisations d'évacuation, en y jetant toutes sortes d'objets hétéroclites, auxquelles elles ne sont ni destinées ni appropriées. Deux ouvriers sont tous tes jours occupés à les dégorger.
Les parties communes sont nettoyées quotidiennement, mais une heure après cette opération, les couloirs et les escaliers sont aussi sales que si rien n'avait été fait.
Les dangers qui résultent d'une pareille situation n'avaient pas échappé aux propriétaires eux-mêmes, sur les injonctions des services administratifs, saisis de nombreuses plaintes, exécutaient de leur mieux, mais à peu près inutilement, les prescriptions qui leur étaient faites. La seule solution aurait consisté dans l'évacuation et la démolition des bâtiments, mais la crise du logement y mettait obstacle.
Par ailleurs, M. Roéland décrit ainsi la cité Jeanne-d'Arc :
Parmi les îlots insalubres, foyers de tuberculose, un des plus caractéristiques est certainement l'ensemble des bâtiments lépreux et sordides situés dans le 13' arrondissement, entre la rue Jeanne-d'Arc et la rue Nationale, et connus sous le nom de cité Jeanne-d'Arc, du nom de la vole privée qui les dessert et leur fournit parcimonieusement une lumière atténuée et un air empesté.
Ces immeubles portent, sur la rue Jeanne-d'Arc, les n° 71 à 81 et, sur la rue Nationale, les n° 162, 164 et 166. Construits en 1860, ils sont élevés de six étages, entourant des cours, véritables puits, de 5 mètres de large, et comprennent 860 logements ou chambres occupés par environ 5,500 personnes.
Les couloirs, très longs, en raison de l'étendue des bâtiments, sont éclairés seulement à leurs extrémités; la ventilation en est, néanmoins, assez-convenablement assurée par des baies, formées par des ouvertures de la dimension des fenêtres ordinaires et dépourvues de vitres. L'éclairage de ces couloirs est électrique, mais les ampoules et les cols de cygne en sont fréquemment enlevés et détériorés par les occupants; il en était d'ailleurs de même auparavant des lampes à huile ou à pétrole.
C'est ce foyer d'infection qu'il s'agit de faire disparaître. Le projet présenté par M. Édouard Renard, que le Conseil municipal a adopté, aboutit à ce résultat que la ville de Paris, moyennant une dépense de 6,250,000 francs, sera propriétaire de 7,642 mètres carrés de terrain, dont 3,000 mètres carrés de viabilité terminée.

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