L'abattoir de Villejuif vu en 1853
Extrait de "Histoire de Paris depuis son origine jusqu'à nos jours, offrant la description de ses accroissements successifs, de ses curiosités, de ses monuments... complétée par une revue pittoresque et détaillée des palais, châteaux et maisons de plaisance dans un rayon de 60 kilomètres, par B. R..."
On arrive à la barrière d'Italie par le boulevard de l'Hôpital et par la rue de Fontainebleau, à laquelle les habitants du 12e arrondissement ont conservé son ancien nom de Mouffetard. Dans le voisinage de cette barrière, mais en deçà des murs, s'élève la manufacture nationale dite des Gobelins, établissement de premier ordre entre les grandes créations industrielles.

Photographie de Pierre Emonts ou Emonds - 1898
CC0 Paris Musées / Musée Carnavalet
Sur le boulevard s'ouvre le vaste abattoir de Villejuif, qui alimente de viande tous les étaux de la rive gauche, et peuple de mouches tous les environs.
À chaque instant on y conduit des troupeaux de bœufs, et il n'est pas toujours sûr pour les piétons de se trouver sur leur passage. Les tanneries de Saleron, des fonderies de suif à chaque pas, des cheminées gigantesques qui versent dans l'atmosphère les fumées du charbon de terre, des ruisseaux infects où croupissent des eaux de savon, d'incessantes exhalaisons de détritus d'animaux, tout concourt à éloigner de ce quartier les personnes que leur profession ne condamne pas à respirer cet amalgame de miasmes putrides.
Aussi n'a-t-il pour habitants que ceux qui veulent de grands espaces à bon marché ; des équarrisseurs, des corroyeurs, des mégissiers, des tanneurs, des marchands de mottes à brûler, des cordiers, des marchands de chevaux, des blanchisseurs, des nourrisseurs, et un certain nombre de jardiniers fleuristes, dont les orangeries exhalent en pure perte des parfums inaperçus. Aussi combien, à sa dernière apparition, le choléra a fait de victimes dans ces lieux où les lois d'une hygiène salutaire ont été, de tout temps, méconnues !
C'est à partir de cette région du faubourg Saint-Marceau jusqu'aux environs de la place Maubert, que l'on remarque le plus triste rabougrissement de la population parisienne ; là l'étiolement est presque général au sein d'une multitude des plus misérables, des plus laborieuses, des plus dégoûtamment nourries, mais pourtant des plus pullulantes, des plus grouillantes surtout : à certaines heures et à certains jours, hommes, femmes, enfants, semblent sortir d'entre les pavés.
C'est dans ce singulier pays que s'amoncèlent et s'emmagasinent les os dérobés aux chiens dans les immondices de la capitale, les vieux haillons destinés à la papeterie, les peaux de lapins pour la ganterie et autres usages, enfin mille ordures d'où le travail, aidé de la science, extraira plus d'or que n'en contiennent les mines trop problématiques de la Californie.

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