Faits divers

 Un rôti de chien enragé - 1873

Un rôti de chien enragé

Le Figaro ― 14 mai 1873

On sait peut-être que la cité Doré, près de l’ancienne barrière des Deux-Moulins, est un quartier composé de cahutes singulières, habitées par des chiffonniers. Quartier modèle s'il en fut... Sa population tient à ce que tout s'y passe pour le mieux, à ce que rien ne vienne entacher la réputation d'esprit pacifique comme de probité de la corporation. À cet effet, les habitants y font eux-mêmes la police, y exercent parfois la justice, et, autant que possible, y exécutent les sentences prononcées. Ils n'aimeraient pas que le commissaire parût chez eux et celui-ci, qui sait jusqu'à quel point ils poussent la surveillance mutuelle, ne contrarie guère leur manie. Aussi, les habitants de la cité Doré viennent-ils d'accomplir eux-mêmes un acte de la plus grande sévérité, à l'occasion et de la manière que voici.

L'un deux avait un chien qu'il avait nommé Canari. Hier, ce chien mord un enfant, du nom de Dufumier, fils d'un des chiffonniers de la petite colonie. Tout de suite, on suppose le chien enragé. Bientôt on s'en croit sûr et l'on s'indigne contre le peu de vigilance du propriétaire de la bête. L'émoi est grand, et un double châtiment ne se fait pas attendre. On se rend en foule à la porte du maître du chien. Un affreux charivari lui est administré, qui dure à peu près un quart d'heure. Un orateur lui reproche en trois mots son incurie coupable. Puis on jette dans sa maison la peau de Canari que l'on vient d'immoler et de couper en quatre morceaux. Les quartiers sanglants sont fixés au bout de bâtons, et l'on annonce au charivarisé qu'ils vont être mangés.

Or, ils l'ont été bel et bien. Et c'est ainsi qu'à la cité Doré on tue les malfaiteurs et qu'on en dîne ensuite, afin qu'il n'en reste plus trace ici-bas.

Le chien était-il enragé ? C'est certainement ce que personne n'avait pu établir. S'il l'était, nous souhaitons à ceux qui l'ont dépouillé, puis mis en pièces, de n'avoir eu aux mains ni coupures ni plaies. Pour ceux qui s'en sont régalés, nous doutons que leur santé y gagne.

Quant au fait, il est de la véracité la plus grande.

On en voit bien d'autres, après tout, dans la cité Doré !



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Saviez-vous que... ?

Paris comptait 140 cités ou villas en 1865. Parmi celle-ci la cité Doré "formée de murailles en plâtras, en planches, occupée par les chiffonniers les plus pauvres du 13eme arrondissement" selon le guide de M. Joanne.

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Le XIIIème devait initialement porter le numéro 20 lors de l'extension de Paris en 1860. Les protestations des habitants d'Auteuil et de Passy qui, eux, se voyaient attribuer les n°13 associé aux « mariages à la mairie du 13e » autant qu'aux superstitions, eurent raison du projet de numérotation et un nouveau projet aboutit à la nomenclature actuelle.

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Le rue Esquirol s'appela Grande-Rue-d'Austerlitz. Son nom actuel lui fut donné en 1864 en souvenir de Dominique Esquirol, médecin aliéniste (1773-1840).

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Le 24 décembre 1883, la presse quotidienne faisait part du décès du « père Moreau » âgé de 100 ans et 3 mois, présenté comme le doyen des chiffonniers, en son domicile du 22 de la rue du Moulinet qu’il occupait depuis plus de 40 ans.
Il était mort d’inanition depuis 5 à 6 jourset son corops était d’une maigreur telle que la peau ressemblait à un vieux parchemin.
Des journaux rapportèrent que l’on trouva dans ses affaires un sac de toile rempli de pièces d’or.

L'image du jour

Angle boulevard de L'Hopital, rue Jenner

L'immeuble à droite constituait la proue de l'ilôt formé par la rue Jenner, le boulevard de la Gare et la rue Esquirol et qui comprenait la Cité Doré. Il disparut avec le percement du tronçon Gare - Hôpital de la rue Jeanne d'Arc