Percement du boulevard Arago
La place de la Collégiale
Le Monde Illustré ― 13 juin 1868

Les démolitions qu'on exécute en ce moment dans le faubourg Saint-Marcel viennent de remettre au jour un coin très pittoresque du vieux Paris.
Au milieu d'un réseau de ruelles aboutissant à la rue Mouffetard, et tout contre la rue des Francs-Bourgeois, existait une petite place d'un aspect étrange, de forme irrégulière et plantée de quelques arbres; c'était la place de la Collégiale. On voyait percer çà et là, à travers le plâtre et le mortier moderne, tantôt une ogive gothique, tantôt des débris de maçonnerie romane. L'enseigne d'un marchand de vins était peinte sur une arcade du onzième siècle et des giroflées sauvages étaient installées, sans scrupules, dans des niches à saint.
Du reste cette place était très fréquentée, c'était l'endroit favori des réunions de la jeunesse du quartier.
La place de la Collégiale occupait un emplacement sur lequel étaient jadis bâties deux églises : la grande Collégiale Saint-Marcel et l'église paroissiale de Saint-Martin.
Saint Marcel ou Marceau, un des premiers évêques de Paris mourut vers 436 et fut enterré dans le lieu nommé Mont-Cétard. Une chapelle fut bâtie sur la tombe du saint; un bourg se forma à l'entour et prit le nom de Montcétard, d'où, par corruption, est venu le mot Mouffetard. Plus tard, ce bourg se rappelant son origine, reprit la dénomination de Saint-Marcel et fut érigé en ville indépendante jusqu'à l'époque de son internement dans les murs de Paris.
La chapelle qui, d'après une tradition que rien ne vient appuyer, du reste, avait été élevée par le paladin Roland, fut entièrement dévastée par les Normands.
On la rebâtit, en l'augmentant considérablement dans le onzième siècle, et elle ne fut définitivement démolie qu'en 1806.
L'église Saint-Martin, quoique moins importante, avait le titre de paroisse et existait déjà dans le douzième; elle fut rebâtie aux quinzième et seizième siècles, et garda son titre paroissial jusqu'en 1790.
Vendue en 1802, elle fut démolie en 1808, et une partie du portail subsista jusque dans ces dernières années.
La collégiale Saint-Marcel possédait le tombeau de Pierre Lombard, savant docteur en philosophie et en théologie, qui mourut en 1164, et dont une rue voisine porte encore le nom.
On a trouvé dans un des angles du clocher un bas-relief antique, représentant un taureau couché, ce bas-relief est actuellement au musée des Thermes. Plusieurs chapiteaux du chœur ont été transférés à l'Ecole des Beaux-Arts.
En démolissant les maisons formant la place, on a dégagé une partie importante de cette église, qui paraît être l'extrémité d'un des transepts.
Ce monument est recouvert de dalles de pierre au milieu desquelles il a poussé quelques petits arbres.
Il est question de conserver le tout, en bordure du boulevard Arago, et de l'entourer d'un jardin.

A lire également
Un nouveau boulevard pour le 12e arrondissement (1858)
L'élargissement de la rue Mouffetard et l'aménagement de la place d'Italie (1867)
La nouvelle place d'Italie en haut de la rue Mouffetard (1868)
Sur les fouilles archéologiques dans le 13e
Dans le faubourg Saint-Marceau
- Intéressante découverte archéologique sur le chantier du boulevard Saint-Marcel (1868)
- Le percement du boulevard Arago met à jour des vestiges du vieux Paris (1868)
- Le percement du boulevard Saint-Marcel (1868)
- Mille ans sous la terre (1871)
- La basilique et les nécropoles de Saint-Marcel (1873)
- L'ancienne nécropole Saint-Marcel (1913)
Et aussi...
Ailleurs...
Les futures grandes voies du XIIIe
Sur les futurs boulevards Saint-Marcel et Port-Royal :
L'ouverture du boulevard Saint-Marcel, entre le boulevard Montparnasse et le boulevard de l'hôpital fut déclarée d'intérêt public par décret du 17 octobre 1857.
- Le futur boulevard Saint-Marcel (Le Journal des débats politiques et littéraires, 26 mars 1857)
- Le boulevard Saint-Marcel (Le Siècle, 6 juin 1858)
- Le futur boulevard Saint-Marcel (Le Siècle, 22 juillet 1861
- Les travaux du boulevard de Port-Royal (Le Siècle, 5 avril 1868)
- Intéressante découverte archéologique sur le chantier du boulevard Saint-Marcel (1868)
- L'ancienne nécropole Saint-Marcel (1913)
Sur le futur boulevard Arago :
Le projet d'ouverture de ce boulevard, désigné dans un premier temps sous le nom de "boulevard de la Santé" fut soumise à consultation en septembre 1858. Il était prévu que cette voie s'ouvrirait en face la place de la Collégiale à la rencontre de la. rue Mouffetard et des rues Pierre-Lombard et des Trois-Couronnes ; qu'elle élargirait la rue Saint-Hippolyte, traverserait la rue de Lourcine au-dessus de l'hôpital de ce nom, et viendrait déboucher sur le boulevard extérieur, après avoir coupé la rue de la Santé, le faubourg Saint-Jacques et l'impasse de Longue-Avoine. Ce fut effectivement ce qui sera réalisé sauf que la voie prit le nom de boulevard Arago car le nom boulevard de la Santé était utilisé depuis 1851 pour désigner le boulevard extérieur entre les barrières de la Santé et Saint-Jacques.
- Le boulevard de la Santé (Le Siècle 7 juin 1858)
- Un nouveau boulevard pour le 12e arrondissement (Le Journal des débats politiques et littéraires, 6 septembre 1858)
- Le percement du boulevard Arago dans le faubourg Saint-Marcel (1868)
Sur la future avenue des Gobelins :
"Entre l'église Saint-Médard et la barrière d'ltalie, la largeur de la rue Mouffetard sera portée à 40 mètres. Ces deux mots suffisent pour faire comprendre quelle révolution causera ce percement sur les bords de la Bièvre Ainsi redressée, la rue Mouffetard sera plus large que le boulevard des Italiens." C'est par ces mots que le Journal des débats politiques et littéraires du 6 septembre 1858 présenta le projet à ses lecteurs et, effectivement, il ne surestimait pas l'importance de celui-ci.
- La rue Mouffetard (Le Siècle, 8 juin 1858)
- L'élargissement de la rue Mouffetard et l'aménagement de la place d'Italie (1867)
- L'élargissement de la rue Mouffetard (Le Siècle, 24 septembre 1867)
- L’élargissement de la rue Mouffetard (Le Siècle, 10 mars 1868)
- La nouvelle place d'Italie en haut de la rue Mouffetard (1868)
Sur les boulevards extérieurs
- La transformation des boulevards extérieurs de la rive gauche (Le Siècle, 20 mai 1862)
- Les travaux sur les boulevards extérieurs (Le Siècle,28 mai 1863)
- Les boulevards extérieurs et le boulevard du Transit dans le 13e arrondissement (Le Siècle, 6 novembre 1863)
- Boulevard d'Italie vu par Fortuné du Boisgobey(1883)
Sur la rue de Tolbiac (Tronçon du boulevard du Transit dans le 13e arrondissement)
La rue de Tolbiac est un des tronçons du grand projet haussmannien consistant à relier la Seine à la Seine par la rive gauche par un axe majeur situé à mi-chemin des anciens boulevards extérieurs et des fortifications. Cet axe mit très longtemps à se réaliser notamment du fait des difficultés que représentaient, dans le 13e arrondissement le franchissement de la vallée de la Bièvre pour lequel plusieurs options furent envisagées.
La rue de Tolbiac ne fut totalement achevée qu'après 1895, année de l'inauguration du viaduc de Tolbiac franchissant les voies du chemin de fer d'Orléans et assurant ainsi la continuité de la liaison de la Seine à la Seine c'est-à-dire du Pont de Tolbiac au Pont Mirabeau, si l'on excepte la reprise du franchissement de la rue du Moulin-des-Prés par la suppression du pont construit initialement.
Premières versions du projet abandonnées.
Outre le franchissement de la vallée de la Bièvre, l'aboutissement de l'axe vers la Seine n'est pas non plus définitivement tranché. Dans cette première phase, c'est le pont Napoléon (futur pont National) qui était visé, le nouvel axe longeant le chemin de fer de ceinture entre la porte d'Ivry et le quai de la Gare.
- Boulevard du Transit : le franchissement de la vallée de la Bièvre (Le Siècle, 6 juin 1962)
- Les boulevards extérieurs et le boulevard du Transit dans le 13e arrondissement (Le Siècle, 6 novembre 1863)
- La prolongation du boulevard du Transit dans le 13e arrondissement (Le Siècle, 30 octobre 1864)
Deuxième projet
- Acquisitions foncières pour le boulevard du Transit (La Gazette de France, 8 mars 1865)
- Ouverture d'une nouvelle voie dans le 13e arrondissement. (Le Figaro, 19 aout 1867)
- La future rue du Transit (Le Petit-Journal, 28 octobre 1867)
La réalisation des travaux
Le deuxième projet du tracé de la rue du Transit ne sera pas davantage réalisé.
La guerre et les évènements liés à la Commune de Paris mirent en sommeil les travaux dans le quartier de la Maison-Blanche et le projet fut rediscuté. Un nouveau tracé, plus au sud, abandonnant la ligne droite et comportant une inflexion, fut adopté.
La nouvelle voie aboutira aussi à un nouveau pont sur la Seine reliant les 12e et 13e arrondissement. Ce sera le pont de Tolbiac.
En 1874, un crédit de 2,5 millions de francs à prélever sur l'emprunt municipal fut voté. Le boulevard du Transit avait déjà couté 43,974,818 fr. selon le Journal des débats politiques et littéraires du 9 décembre 1874. Les travaux de franchissement de la vallée de la Bièvre pouvaient enfin réellement commencer.
Charles Marville les immortalisa par les deux seules photographies connues de ces travaux.
- Les travaux de construction de la rue de Tolbiac (1877)
- Le prolongement de la rue de Tolbiac (1877)
- La nouvelle rue de Tolbiac (1877)
- Les nouvelles voies de la rive gauche (1878)